Jean-Paul Chabrier pour Avril en octobre aux éditions de l’Escampette
Rapport d’Alain Quella-Villéger
Pertinence et impertinence : j’ai souvent pensé que l’homme comme l’œuvre doivent savoir ou pouvoir manier ces deux qualités humaines parce qu’elles se complètent. Jean-Paul Chabrier, je ne le connais pas assez pour dire ce qu’il est au quotidien, dans l’intimité d’Angoulême où il vit, mais ses écrits me semblent répondre à ce principe de distance critique et d’ouverture.
Comme lecteur cultivé, comme créateur d’une revue opportunément nommée Le Paresseux et d’un blog non moins programmatique le ciel au-dessus de la rue et dans les autres métiers du livre et du cinéma qu’il a pratiqués, il fait preuve de l’exigence qui nourrit la pertinence, de cette rigueur qui fut celle sans doute d’un aïeul forgeron : c’est lui à la page 186, et cela se passait à Jonzac, où Jean-Paul Chabrier est né en 1954. Comme auteur, « dilettante » ont dit certains, il manie l’autodérision, l’humour, une distance qui peut conduire littérairement jusqu’au fantastique – et au canular. Je vous conseille « Vendredi prochain, je passe à la télévision régionale » !
Ce plaisancier de l’écriture et des sentiments impertinents est là, dans le recueil de nouvelles Avril en octobre, aujourd’hui primé (L’Escampette, décembre 2011), rassemblé, dispersé, avec des personnages qui émeuvent, intriguent, déconcertent. Son livre s’éparpille aussi à Prague, à Venise, à Barcelone, aussi serait-il réducteur d’y chercher seulement le texte intitulé « Angoulême en hiver » (la ville anonyme de Sud-Ouest en 1999), ou cet aveu descriptif, où il est question des « aubes radieuses d’une courte vallée de Charente, hauts peupliers, champs de maïs, d’orge, chemins de calcaire, constellation du cœur ? » Mais une phrase initiale annonce bien sa manière : « J’aime les Indiens – pourtant ils ne m’ont rien fait. ». En est-il de même des Charentais ?!