Jean-Louis Hillairet pour L’artisanat antique à Saintes

Rapport d’Alain Michaud

 

Dans sa série Recherches archéologiques en Saintonge, la Société d’archéologie et d’histoire de la Charente-Maritime a fait paraître en 1995 un numéro consacré à L’artisanat antique à Saintes. Ce remarquable travail, dû à un archéologue, ancien président de cette association, Jean-Louis Hillairet, avait fait l’objet d’un mémoire de l’École des hautes études en sciences sociales réalisé l’année précédente. Il s’agit là d’un sujet très technique. Dans un domaine difficilement accessible et peu connu du grand public, cet ouvrage a le mérite de présenter une synthèse des connaissances anciennes et des découvertes récentes qui se sont multipliées au rythme toujours accru des travaux de voirie et d’urbanisme. Avec une grande abondance de plans, de croquis, de dessins, de photos d’objets et une importante bibliographie, Jean-Louis Hillairet dresse avec minutie, métier par métier, la carte des ateliers saintais, la répartition spatiale et chronologique des officines à travers les différentes périodes d’extension de Mediolanum, l’éventail et l’évolution de leurs productions…
Ce travail qui, de l’aveu de l’auteur, s’est heurté au manque d’études exhaustives, à l’absence de renseignements sur les quartiers qui correspondent aujourd’hui au centre ancien de la ville, permet néanmoins de rééquilibrer aux yeux du public une cité romaine trop souvent réduite à l’image prestigieuse de ses monuments et de ses élites tôt romanisées qui les ont financés. Stèles, chapiteaux, entablements, cruches et cruchons, pesons, douelles de tonneaux, vestiges de fours, de fosses et de bassins font revivre toute une population artisanale qui nous révèle une autre Mediolanum, populeuse et industrieuse, celle des potiers des rives de la Charente, des verriers, des tablettiers, des forgerons, des tisserands et des tanneurs. Cette production artisanale culmine à la fin du Ier siècle et au début du IIe, surtout dans les quartiers du nord-ouest de la cité, pour décliner très sensiblement ensuite et disparaître sans doute en fonction de la perte d’influence de Saintes au profit de Poitiers et de Bordeaux. On notera pour finir que l’apparition de l’artisanat antique à Saintes permet à Jean-Louis Hillairet d’aborder un autre problème, celui de l’origine même de la ville, romaine ou gauloise. S’il semble bien qu’au regard des derniers développements de la recherche, ce soit vers l’hypothèse gauloise que penche sa faveur, il se garde de prendre trop nettement position. Il nous reste à souhaiter avec lui et tous les archéologues saintais que des fouilles d’envergure à l’emplacement de l’hôpital et du couvent de la Providence permettent de lever ce voile obsédant des débuts lointains de la cité.

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