Nicolas Champ pour La religion dans l’espace public
Couverture La religion dans l’espace publicL’ouvrage intitulé La religion dans l’espace public : catholiques, protestants et anticléricaux en Charente-Inférieure au xixe siècle, publié par la Fédération historique du Sud-Ouest est le résumé en 520 pages serrées de la thèse de doctorat soutenue à Bordeaux l’année dernière par Nicolas CHAMP, jeune professeur agrégé d’histoire. Tel quel, ce copieux « résumé », qui se lit fort bien, est un excellent exposé reposant sur une recherche considérable de documents originaux, présenté, comme tout travail universitaire avec de très nombreuses notes, des tableaux, une copieuse bibliographie. C’est un tableau précis et complet de la place de la religion dans un département aux aspects très variés, depuis la reconnaissance officielle des trois cultes par le Concordat, jusqu’à la Séparation des Eglises et de l’Etat, aboutissement de la montée de la laïcité et de la libre-pensée. C’est une histoire religieuse du siècle avec au fil des années, et selon le territoire géographique, la reconquête religieuse catholique, l’évangélisation protestante, la montée de forces toujours anticléricales, mais pas toujours irréligieuses, tant sont vives les rivalités, les contradictions internes et externes lors de la construction d’édifices, l’érection de statues, de croix, la gestion d’écoles et d’établissements hospitaliers, l’accès aux cimetières, les funérailles, les processions…
L’auteur distingue et analyse cinq entités géographiques différentes : les villes ; le monde insulaire ; les terres de coexistence religieuse ; les terroirs où l’identité catholique est respectée ; les terres indifférentes, sinon irréligieuses.Chronologiquement, le premier tiers du siècle montre chez les catholiques un essai de reconquête avec l’ouverture de petits séminaires, l’érection de croix ; chez les protestants la construction de temples. De la Monarchie de Juillet à 1880, construction intense d’églises, action des consistoires et des pasteurs, compétition entre les écoles. A partir de 1880, dégagement de l’Etat, financement des fidèles, lutte des maçons et surtout des libre-penseurs contre le cléricalisme, enseignement public où les protestants se trouvent à l’aise.
Cette étude très intéressante nous donne à réfléchir sur des problèmes encore d’actualité, comme l’identité nationale ou la tolérance. Pour une fois qu’une thèse de qualité couvre l’ensemble du département dans ses diversités, l’Académie de Saintonge ne peut être indifférente.