Panorama de l’année culturelle Saintongeaise en 2018
Discours d’ouverture des Prix de l’Académie de Saintonge 2018 : Marie-Dominique Montel
Directrice de l’Académie de Saintonge
Mes chers collègues de l’Académie, mesdames et messieurs les élus, mesdames et messieurs les représentants des institutions culturelles et de la presse, mes chers amis, je suis heureuse de vous retrouver à Royan pour notre Cérémonie des prix 2018 de l’Académie de Saintonge. Je tiens à exprimer notre reconnaissance à la Ville de Royan et à son maire M. Patrick Marengo pour leur soutien généreux et fidèle depuis de longues années et leur accueil dans cette salle Jean-Gabin. Je voudrais également remercier le département de la Charente-Maritime, à nos côtés depuis toujours, pour nous aider à organiser cette cérémonie.
Les lauréats que nous allons couronner dans quelques instants se verront décerner des prix qui portent le nom des mécènes qui les ont fondés. Il y a, parmi eux, des collectivités et des particuliers. Et je voudrais ici remercier comme ils le méritent ces mécènes qui financent nos prix de l’Académie et sans qui ils n’existeraient pas. Il s’agit de la Ville de Marennes, la Ville de Rochefort, la Ville de Royan, la Ville de Saintes, la Communauté d’agglomération Royan-Atlantique, la Communauté de communes de la Haute-Saintonge, le Mémorial de la NouvelleFrance qui finance le prix Champlain, l’Aquarium de La Rochelle qui finance le prix de la Mer, monsieur Patrice Roquefeuil pour le prix Dangibeaud et le prix Jehan Delatour de Geay, madame Christine Sébert-Badois pour le prix Jacques et Marie-Jeanne Badois, madame Francette Joanne pour le prix Louis Joanne, madame Roselyne Coutant pour le prix de l’innovation René Coutant. Et la liste n’est pas close. Permettez-moi d’en profiter pour vous dire que si certaines collectivités locales ou certaines personnes présentes ici souhaitent financer un prix de l’Académie et sont uniquement retenues par une bien compréhensible timidité naturelle, je les encourage chaleureusement à la surmonter !
Établir un palmarès qui se monte cette année à treize prix, tout en restant d’une exigence extrême sur la qualité des travaux récompensés, cela demande beaucoup de travail. Ce serait une erreur monumentale de penser que l’Académie de Saintonge n’est qu’une sorte de club d’amis érudits et sympathiques, bien que l’amitié y tienne sa part, que l’érudition soit requise et que les académiciens soient extrêmement sympathiques. En réalité l’Académie rassemble des talents et des sommités dans leurs domaines qui sont variés pour nous permettre de couvrir les champs de la connaissance, de la recherche, de la création. Il y a des scientifiques, des historiens, des hommes et femmes de lettres, des experts en art, en archéologie, des spécialistes du patrimoine, des personnalités de l’audiovisuel ou de la diplomatie. Ils ont comme mission de surveiller en permanence ce qui se fait de mieux dans leur champ d’expertise, mais ce sont aussi des gens d’ici, particulièrement au fait des créations et des travaux entrepris par les hommes et des femmes de la région. Chaque année, c’est un travail méticuleux et de longue haleine, chaque membre de l’Académie recense et signale aux autres les personnalités qui, dans son domaine, mériteraient d’être primées…
Ainsi vingt-cinq personnes se mobilisent à chaque saison, enquêtent chacune de leur côté avant de se réunir à plusieurs reprises pour examiner les propositions, retenir les plus valables, élire enfin les lauréats de l’année. Il faut également écrire et faire réaliser la brochure que vous avez entre les mains, monter et organiser cette cérémonie des prix, faire fabriquer et graver les médailles, rester en communication avec nos généreux mécènes. Je salue particulièrement le travail d’Alain Quella-Villéger, notre directeur adjoint, et de Christine de Ponchalon, notre secrétaire, et de tous nos collègues qui ne ménagent pas leurs efforts pour faire fonctionner l’Académie.
Et ça marche depuis plus de soixante ans ! Cela ne tient pas seulement du miracle, cela tient à beaucoup de compétences, d’enthousiasme, pas mal de générosité et beaucoup de travail. Et je vous demanderai de ne pas ménager vos bravos aux membres de l’Académie de Saintonge à qui je vais demander de se lever… sous vos applaudissements.
Nous allons procéder tout à l’heure à la réception d’un nouvel académicien, Pascal Ferchaud, professeur agrégé d’économie, auteur de plusieurs ouvrages d’histoire régionale en particulier sur la Seudre et Saujon dont il est le maire. Notre collègue, l’ancien ambassadeur de France Jean-Louis Lucet ayant demandé à devenir membre honoraire, Pascal Ferchaud a été élu à son siège, le 21e de l’Académie. Il a été élu au mois de décembre, il a déjà assisté à nos réunions, il devient officiellement académicien à partir d’aujourd’hui.
À ce propos, pour ceux qui se demandent encore pourquoi les membres de l’Académie de Saintonge sont titulaires de simples sièges tandis que ceux de l’Académie française ont des fauteuils, je rappellerai l’histoire. Hélène Carrère d’Encausse, secrétaire perpétuelle de l’Académie française et avec qui je parle de temps en temps de notre Académie de Saintonge, m’a expliqué le fin mot de l’affaire. Jadis les académiciens français eux aussi avaient de modestes sièges. Tous semblables. Jusqu’au jour où ils élurent parmi eux un prince très cultivé, mais un prince du sang tout de même qui décida, eu égard à son rang, d’apporter à l’Académie pour son propre usage un très beau fauteuil. L’Académie qui était égalitaire s’en émut un peu. Le roi fut informé. C’était Louis XV, un roi qui avait de l’esprit. Il fit livrer illico trente-neuf fauteuils identiques !
J’en reviens à l’Académie de Saintonge, nous ne sommes pas quarante, mais vingt-cinq : dix-sept académiciens et huit académiciennes que l’on reconnaît, comme on dit, à leur plumage chatoyant. Et je me suis aperçu en dressant la liste de leurs professions qu’il y en avait une qui ne figurait plus dans notre cénacle, que d’ailleurs on n’enseigne guère à l’université et qui avait disparu sans qu’on s’en émeuve sur le curriculum vitæ et les cartes de visite, alors que c’était comme l’ostréiculture, le cognac, la construction navale, l’une des spécialités reconnues et appréciées de notre région, une sorte d’artisanat local qui faisait notre renommée.
Je veux parler du beau métier d’explorateur. Un métier exercé par Samuel de Champlain, natif de Brouage parti au Canada ; par Aimé Bonpland de La Rochelle, en Amérique du Sud ; les frères Lesson de Rochefort, dans le Pacifique ; René Caillié de Mauzé-sur-le-Mignon, à Tombouctou ; Henri Coudreau né à Sonnac, en Amazonie avec sa femme Octavie ; Nicolas Baudin de Saint-Martin-de-Ré, en Australie ; Jean-Constant Quoy de Saint-Jean-de-Liversay, en Océanie ; François Fresneau de Marennes, en Guyane d’où il rapporta le caoutchouc et la pomme de terre dont Parmentier sut si bien faire la publicité. Notre Académie, dans son jeune temps, a été dirigée par l’arrière-arrière-petit-fils de ce François Fresneau : François de Chasseloup-Laubat, explorateur dans les jungles de Malaisie en 1928, dans le Pérak et le Pahang, puis au Sahara et dans le Hoggar en 1935 jusqu’au lac Tchad, dont il effectue la première traversée de Fort-Lamy à Nguigmi. Ses précieux résultats scientifiques lui valent la médaille d’honneur de l’Institut Pasteur. Il fut l’un des fondateurs de l’Académie de Saintonge et devint son directeur dans les années 60.
Si le métier d’explorateur se rencontre moins, est-ce que le moule est cassé ? Pour peu que nous réfléchissions, force nous est d’admettre que nous venons tous de loin. Chacun de nous est héritier d’une longue lignée, faite de générations qu’il ne connait pas et chacun a été déterminé par des enchaînements d’événements inextricables qu’il n’avait, pour la plupart, pas choisis. Rien de tout cela n’impliquait que nous puissions avoir l’envie et la capacité d’être là ensemble aujourd’hui. Rien, sinon peut être une petite étincelle que nous avons en commun, un attrait pour les découvertes, cette étonnante disposition de l’esprit qui fait… les explorateurs.