Réception d’Olivier Dubois au 22e siège de l’Académie
Discours de présentation par Christine Sébert-Badois
À Saujon, depuis plus de 160 ans, dans son centre thermal créé par l’arrière-arrière grand-père d’Olivier Dubois, que nous accueillons avec plaisir aujourd’hui, on soigne l’anxiété, maladie, avec de l’eau thermale ! Dans notre monde cartésien, cela relève du défi et même d’une forme d’utopie sérieuse s’il en est puisque toutes ces générations de médecins, donc de scientifiques, se sont penchées avec succès sur la question.
Le Docteur Olivier Dubois est né en 1962 entouré, selon ses propres mots, de parents attentifs et aimants. C’est par son père, Jean-Claude Dubois, psychiatre lui-même, qu’il découvre la médecine. À 10 ans il sait qu’il veut être médecin. Suite logique, après des études médicales à Bordeaux, un internat en psychiatrie à Lille de 1989 à 1993, une thèse en 1992, un mémoire de psychiatrie en 1993, Olivier se lance dans le monde hospitalier.
Il exerce ensuite dans un service hospitalo-universitaire de l’hôpital Sainte Anne à Paris, celui des professeurs Lôo et Olié : il se dit impressionné par ses professeurs. Si la psychiatrie est le parent pauvre de la médecine, c’est une spécialité qui l’intéresse vraiment parce que plus qu’un héritage (et je tente de transcrire les mots d’Olivier), « elle permet une intimité avec les patients par la gravité des questions posées très liées avec l’existence même de l’homme ».
Le cerveau est un organe, me souffle-t-il, comme le cœur et le rein, peut-être, mais on ne le transplante pas encore…
Je m’égare : comment le docteur Olivier Dubois décide-t-il de s’installer à Saujon ? L’héritage familial, bien sûr, en 1993, Jean-Claude Dubois, son père, a 73 ans et la décision n’est pas facile. Mais il est attiré par le projet de soin et l’ambition médicale : l’idée est de se projeter dans l’avenir.
Un de ses frères, neurologue lui-même, le pousse dans cette voie.
Olivier se marie avec Caroline : ils ont quatre enfants nés à Royan (trois garçons et une fille).
Aujourd’hui, la station thermale de Saujon est la première en terme de progression (224% en 20 ans). Si parfois le thermalisme peut être mal compris par les prescripteurs, les malades s’en ressentent mieux.
Mais le Docteur Olivier Dubois complète ses activités de soignant en s’appuyant aussi sur la communication scientifique :
Membre de sociétés savantes, il est aussi enseignant sur le DESS de psychiatrie de Poitiers depuis 2016. Il est référent national en terme de santé mentale soignée par le thermalisme.
Très impliqué dans la transmission, il souhaite développer l’école thermale du stress. L’idée est de sevrer les malades médicamentés avec un accompagnement pour tenter de maîtriser leurs angoisses. Le but est de leur apporter des outils psycho-pédagogiques pour qu’ils dépassent leurs peurs.
Récemment, vingt-cinq lits d’hospitalisation ont été créés pour traiter la bipolarité, ce qui fait de Saujon un centre régional référent pour traiter cette affection.
En synthèse, nous pouvons dire que le Docteur Dubois a un parcours complet de soignant, de communiquant et d’enseignant dans un contexte où l’idée est de développer le soin psychiatrique et le bien être dans ce lieu emblématique familial.
Nous sommes heureux de lui souhaiter bonne chance et courage dans la continuité de cette belle entreprise et la bienvenue dans notre Académie.
Discours de réponse d’Olivier Dubois
Mesdames et Messieurs les Académiciens,
C’est un réel honneur de devenir membre de cette prestigieuse institution qu’est l’Académie de Saintonge. Je suis heureux d’y être invité, et donc choisi parmi tant d’autres, sans doute et je l’espère, pour quelques qualités et une certaine expérience, mais aussi de pouvoir pénétrer cet univers qui sera jalonné de rencontres, de découvertes, d’histoires chargées d’art, de culture et d’émotion.
Merci infiniment à chacun d’entre vous de m’y accueillir et de me faire ainsi confiance.
Merci aussi à mon amie Christine Sébert-Badois qui a manifestement joué un rôle important dans cette intronisation pour cette nouvelle Éternité.
Permettez-moi de rendre également hommage à mon père, le Dr. Jean-Claude Dubois, qui m’a précédé à ce siège et qui, par l’intérêt qu’il y a toujours trouvé, n’a fait que renforcer mon espoir de pouvoir l’intégrer un jour.
Christine m’a ainsi présenté : médecin psychiatre, Président des thermes et des cliniques de Saujon, auteur d’ouvrages, de travaux de recherche, d’enseignement.
L’ Académie a-t-elle besoin d’un psychiatre à son chevet ? Assurément non, je le précise. Ce n’est bien évidemment pas à ce titre ni à celui de médecin que je suis convié. Mais contrairement à ce que savent bon nombre de nos concitoyens, la psychiatrie est aux confins de deux types de sciences finalement très complémentaires : l’une, plus fondamentale, est portée par la connaissance, l’autre plus littéraire est à base d’humanisme. La première consiste à étudier le cerveau comme un organe en capacité de souffrir, de se dérégler, qu’il est nécessaire de soigner, comme tout autre organe ; la seconde qui intègre de nombreuses approches (sociales, psychologiques, environnementales, …) doit intégrer toutes les données existentielles pour discerner la place de chaque élément à l’origine des perturbations du cerveau. Il existe ainsi, comme chacun le sait, une immensité de logiques et de voies différentes pour tenter d’atteindre et de modifier les mécanismes du psychisme.
L’expérience m’a appris à constater qu’il ne faut pas opposer le cerveau-organe, qui peut se dérégler ou tomber malade, au même titre que le cœur ou le rein, et le cerveau-objet de relations interpersonnelles qui ressent tantôt bonheur, tantôt tristesse. Tout le mystère tient en ces deux questions : lequel des deux cerveaux entraîne-t-il l’autre dans sa chute ? Quel impact chacun a-t-il sur l’autre ?
Le médecin du psychisme et de l’âme qu’est le psychiatre, doit avant tout savoir repérer, évaluer la souffrance du cerveau et la traiter comme n’importe quel spécialiste le fait pour un autre organe, mais aussi accompagner l’individu dans sa compréhension du trouble, dans la gestion de ses émotions, et dans l’aide à donner sens à ses symptômes qu’ils soient d’ordre psychique ou somatique.
La médecine est à mes yeux, autant un art qu’une science, autant un humanisme qu’une logique, ce qui en fait son extrême grandeur et exigence.
Il est remarquable de constater que les médecins sont souvent attirés par l’art comme la culture. La culture est une ouverture ; elle a un incroyable pouvoir de subversion positive ; elle est une force de construction qui rapproche les hommes, les sort positivement d’eux-mêmes et aide à la prise de recul et à l’élévation de l’âme.
Si le choix de mon métier s’est porté vers la médecine et donc la psychiatrie, j’ai appris beaucoup de mes autres fonctions, notamment comme président des cliniques et des thermes de Saujon qui emploient près de 200 salariés. C’est une fonction exigeante qui amène autant à découvrir les autres qu’à se découvrir soi-même, notamment dans la confrontation à la difficulté et à la différence. J’ai ainsi cette chance inouïe de ne travailler que dans l’humain, qu’avec l’humain et pour l’humain. Ma vie ne vise qu’à tenter de redonner espoir à ceux qui souffrent comme à ceux qui les encadrent ; mais aussi d’adapter les soins dans un monde moderne qui, par ses progrès technologiques permanents et sa précipitation incessante ne manquent pas de précipiter toujours plus d’individus dans le découragement et la recherche de sens.
Je suis heureux à cet instant de dire l’héritage du Dr. Jean-Claude Dubois qui fut aussi bien mon père, mon conseiller, mon ami, mon confrère, et mon maître. Cet homme possédait tout à la fois un esprit scientifique, une connaissance littéraire et historique rares, mais aussi une ouverture certaine pour toute forme d’art et de culture qui l’inspiraient sans cesse ; le tout, enrichi par un sens de l’autre et une profonde humanité, ce qui est sans doute un joli pléonasme.
Je suis à la fois un peu honteux de constater que je n’ai finalement fait que suivre pas à pas son chemin, et me laisser guider par ses traces, tel le petit poucet et ses petits cailloux. Mais finalement non, je retiens plutôt, avec fierté, qu’il m’a transmis une partie de ses belles et nobles qualités.
Je ressens aujourd’hui, alors que ma carrière est bien avancée, le besoin de m’ouvrir à d’autres opportunités, à d’autres univers, à d’autres vies, régionales, bien sûr, puisque je suis resté attaché à la Saintonge où j’ai vécu l’essentiel de ma vie, hormis un intermède pour mes études d’une douzaine d’années et des pérégrinations à Bordeaux, Agen, Lille ou Paris…
Mon épouse Caroline, historienne de l’Art et artiste-peintre, m’apporte beaucoup dans cet intérêt pour l’Art. Je la remercie pour son soutien précieux dans toutes mes activités.
Il est toujours intéressant de comprendre ce qui anime et passionne toutes ces personnes qui se sont consacrées à d’autres univers. Le hasard nous a amené à un endroit, à choisir une profession, mais notre vie aurait sans doute pu être dirigée autrement et ailleurs, en fonction de nos rencontres, de nos histoires personnelles. Avec ces remises de prix annuelles par l’Académie, ces rencontres avec de belles personnalités locales (historiens, cinéastes, écrivains, peintres, scientifiques, que sais-je… ?) ne seront que des moments de bonheur : qu’y -a-t-il de plus beau au fond que de rencontrer ces artistes qui vivent leur vie avec passion, qui ouvrent l’horizon et n’ont qu’un désir : partager leur génie !
L’heure est sans doute venue, pour moi, de vivifier davantage mon plaisir à rencontrer ces êtres remplis de vie, de passion ; une passion qui est une porte ouvrant vers la compréhension, l’espoir, et même l’Espérance.